Les créations d’écoles Nouvelles des années 1950-1960 : des militantes méconnues ?

Communication présentée par Fabienne Karsky du colloque du PAJÉP L’Éducation nouvelle au service d’une nation à réformer : entre espoirs et réalités (1930-1970)

Ceci est le fruit d’un travail collectif qui a rassemblé d’anciens et d’actuels enseignants et parents des écoles de l’ANÉN (Association Nationale pour le développement de l’Éducation Nouvelle) autour de l’histoire de la création des écoles privées et laïques qui en font partie aujourd’hui. Ce travail a pu être réalisé grâce à la consultation des archives de ces écoles, mais aussi grâce aux entretiens que nous ont accordé des personnes à l’origine de la création des écoles, ou encore ayant accompagné dès le départ ces écoles qui inscrivent dans leur charte leur appartenance à l’Éducation nouvelle.

Introduction

Ces écoles naissent dans le contexte de l’après-guerre, au moment où la reconstruction est nécessaire, où le renouveau de l’éducation paraît incontournable. Du coté des parents, la demande est importante pour une éducation différente, qu’il s’agisse de parents cherchant des solutions pour résoudre les problèmes de leur enfant en difficulté, ou souhaitant éloigner leur enfant d’un enseignement traditionnel jugé insatisfaisant, et leur faire bénéficier d’une éducation tendant vers le plein épanouissement de l’enfant et prenant en compte les avancées psychologiques et pédagogiques de l’époque.

De nouvelles « écoles nouvelles » cherchent à concrétiser ces principes. Parmi celles-ci nous trouvons des écoles publiques, telles l’école Decroly de St Mandé, rattachée à l’Éducation nationale en 1948, ou encore la Nouvelle école de Boulogne dirigée par Marie-Aymée Niox-Chateau et Blanche Harvaux, créée en 1947, terrain de stage pour les animateurs des CÉMÉA, dont l’expérience sera stoppée en 1952. Én effet, l’élan réformateur de la Libération ne dure pas, la guerre froide se profile, et le plan Langevin-Wallon, qui consacres les avancées de l’Éducation nouvelle et propose une réforme générale et en profondeur de l’enseignement public, ne sera jamais appliqué, malgré le succès des « classes nouvelles » voulues par Gustave Monod dans l’enseignement secondaire, dont l’expérience prend fin en 1952 également.

Pourtant des écoles privées, créées au lendemain de la guerre, comme l’école de la Source, ou encore l’école du Père Castor, résistent et continuent d’appliquer les méthodes actives prônées par les pédagogues. Certaines d’entre elles, associées en réseau au sein de l’ANÉN, existent encore aujourd’hui. Ces écoles ont chacune une histoire particulière : elles sont apparues, à des moments différents et dans des contextes sociaux économiques particuliers. Cependant elles ont toutes été créées par des praticiennes d’un même courant de pensée animé par des « maîtres » à l’exemple de Roger Cousinet, Paul Faucher, Émilie Brandt ou encore Renée Lebel à Lyon, personnalités auprès desquelles les futures directrices des écoles nouvelles ont appris les grands principes de l’Éducation nouvelle reposant sur une vision différente de l’enfant, un enfant vu dans sa globalité, acteur de ses apprentissages, un enfant pour lequel « le maître doit être un renseigneur et non un enseigneur », selon le mot de Cousinet. C’est cet enseignement qu’elles transmettront à leurs équipes enseignantes, qu’elles formeront en vue de prendre le relais après leur départ.

Nous verrons dans une première partie quelle était la personnalité de ces femmes directrices d’école, avant de nous attacher dans une deuxième partie plus précisément au moment de la création des écoles, et de parcourir dans une troisième partie les réseaux qui les liaient.

1ère partie : la personnalité des créatrices d’écoles nouvelles

Si l’on en croit les témoignages, nous trouvons à la direction de ces écoles des femmes d’un tempérament certain, militantes, qui oeuvreront toutes leur vie au service de l’Éducation nouvelle, participant ainsi, comme le dit Marie de Vals :

« à une transformation, à quelque chose d’important, […]nous avions une action sur la cité. C’est cela, la politique : entrer dans la vie de la cité ! »

Convaincues de se battre pour la bonne cause, elles ne baissent jamais les bras devant les difficultés rencontrées et mettent tout en œuvre pour réaliser leurs projets. Ainsi Émilie Roustin, directrice de l’école de Neuilly, le jardin d’enfants que lui a confiée Émilie Brandt, dont elle est l’élève , et qui deviendra l’école Émilie Brandt de Levallois, se bat pour que la pédagogie spécifique de l’école soit reconnue, et n’hésite pas à ouvrir en 1949 une classe primaire sans autorisation, dont elle obtiendra la régularisation on ne sait comment… Élle est sur le terrain pour trouver des locaux plus grands, grappille des salles à gauche et à droite. Sa volonté à accueillir tous les enfants, quelle que soit la situation sociale des parents, finit par emporter le soutien de la mairie de Levallois qui accorde des aides à l’école et restera présente aux côtés de l’école, quelles que soient les équipes municipales, l’établissant ainsi en véritable école de quartier. Émilie Roustin est également une des premières à obtenir pour son école un contrat d’association avec l’État en 1961.

La personnalité de ces femmes semble être caractérisée par une grande ouverture sur le monde en général. Elles ont une formation de jardinières d’enfants et poursuivent ensuite leurs études, en pédagogie, en psychologie, en linguistique, en sciences de l’éducation, soit à la suite de l’obtention de leur diplôme de jardinières d’enfants, soit au cours de leur carrière. On retrouve également chez chacune d’elles une détermination sans faille pour appliquer cette nouvelle éducation qui voulait rendre les enfants heureux. Et cette éducation globale, basée sur l’observation des enfants, ne pouvait être réalisée à l’école que par un travail en équipe : enseignants, éducateurs, parents, autour d’un projet d’école afin d’assurer une continuité éducative et pédagogique . En plus de créer leur école, elles se sont donc toutes attachées à créer une équipe éducative. Cela se traduit par un investissement humain évident et nombre d’entre elles consacreront leur vie à leur école, quelles que soient les circonstances, ainsi Émilie Roustin, qui a de nombreux problèmes de santé au cours de sa vie, vient faire classe malgré ses plâtres, et lorsqu’elle se trouve à l’hôpital y fait se déplacer ses collègues pour faire le point…

A l’exception de Marie Rist, ces femmes sont célibataires et sans enfants , ce qui leur permet de se consacrer toutes entières à leur école. Elles viennent de milieux cultivés et ouvert sur le monde, catholique ou protestant, comme c’est le cas de Marie Rist , née Marie de Lacroix, qui voyage beaucoup dans son enfance, reçoit une éducation raffinée dans laquelle l’art tient une place importante, avant d’obtenir son diplôme de jardinière d’enfants, complété d’une formation à la psychopédagogie . Cela la conduit à participer à la création des classes maternelles du lycée français de Prague, puis à s’occuper de jeunes enfants dans un appartement familial parisien, comme cela se faisait beaucoup à l’époque, avant d’enseigner à l’École Alsacienne, où elle rencontre Mme Girard, formatrice à l’école de jardinières d’enfants de Sévigné, l’École Alsacienne est en effet le lieu de stages du collège Sévigné. Mme Girard, appelée par Paul Faucher pour prendre la direction d’une école attenante à son atelier d’éditeur , convainc sans peine Marie Rist de la rejoindre à la tête de cette nouvelle école. C’est ainsi que la première année chacune d’elles prend en charge une classe de 25 enfants à l’école du Père Castor, et l’école s’agrandira au fur et à mesure que les élèves monteront de classe, jusqu’à accueillir 140 enfants en 1961. Marie Rist s’y épanouit, apprend beaucoup aux côtés de Paul Faucher et Mme Girard, et applique dans ses classes les méthodes de mesdames Audemars et Lafendel de la Maison des petits à Genève, l’école d’application de l’Institut Jean-Jacques Rousseau qu’elle a visité avant la guerre. Les enfants et leurs parents y sont heureux, et lorsque l’école devra fermer, pour différentes raisons , les parents se mobilisent avec l’équipe enseignante pour trouver une solution. C’est ainsi que sera créée l’école d’Antony, grâce à l’investissement financier de Marie et Noël Rist, de leur famille, mais également de l’apport financier des parents. Dès le départ l’école est le centre d’application du CRPA, Centre de recherche et de pédagogies actives, au sein duquel Marie Rist, son équipe enseignante, et les parents, poursuivent les réflexions sur l’Éducation nouvelle.

2e partie : la création des écoles

La création des écoles s’organise différemment à Lyon. Denise Poirieux et Françoise Jandin sont déçues par le système scolaire traditionnel. Après leur formation de jardinières d’enfants avec Mlle Renée Lebel , qui donne des cours de psychologie et intervient dans deux écoles de jardinières d’enfants, où fera également ses études Marguerite Bernard, directrice de l’école de la Rize, elles enseignent une dizaine d’années dans des établissements catholiques traditionnels avant de fonder leur école, l’école du Chapoly, en 1963, après avoir constaté que “le système était rigide, obsolète, et qu’il laissait de côté des enfants”. Elles souhaitent créer une école pour tous les enfants, et non seulement pour des enfants de milieux privilégiés. Pour mener à bien leur projet, elles vont visiter les autres écoles nouvelles de Lyon, l’école d’Écully de Germaine Parot, l’école de la rue de Servient dirigée par Marguerite Bernard, mais aussi celles de Paris, l’École nouvelle d’Antony, la Source à Meudon, et rencontrent également Mme Niox-Chateau. Puis elles partent visiter une école Decroly en Belgique , ainsi que l’École internationale de Genève où une élève de Mlle Lebel était professeur. Enfin elles vont également à Bollène visiter l’école de la communauté de l’Arche, qui appartient au mouvement non violent, Lanza del Vasto . L’école est créée grâce à un parent d’élève qui fournit une maison et un terrain à Tassin la demi-lune, près de Lyon, à Mlle Lebel qui d’une part contacte le directeur de la DDASS de l’époque et obtient un million de francs, et d’autre part rassemble un groupe d’amis qui se cotisent et font un prêt de 4 millions de francs, et à un groupe de parents d’enfants en difficulté faisant partie de la classe de Denise et qui étaient partants pour continuer après le CP. Élles organisent tout elles-mêmes, animent des ateliers artistiques et sportifs, fabriquent avec l’aide des parents le materiel Montessori, inventent de nouveaux rôles comme celui de cuisinière pédagogique, les enfants devant manger sur place le parti est pris de faire du moment de cuisine une expérience d’éducation active et globale avec les enfants : « Il fallait donner conscience aux enfants du rôle qu’ils jouaient à la cuisine ; leur faire comprendre qu’ils avaient des responsabilités ; qu’il fallait aussi être rentable.

C’est aussi des apprentissages « cognitifs » : notions droite et gauche….Un enfant qui avait eu en classe une leçon sur les frais généraux, vient à la cuisine et après avoir cassé accidentellement un verre dit à Françoise « le verre devra passer dans les frais généraux ! »

L’école à sa création recevait 19 enfants dont 12 en difficulté . La 2e année ; 50 élèves sont inscrits. A la fin de la 4e année, l’école refuse 53 inscriptions, et obtient le contrat d’association en 1968.

On retrouve un autre exemple de mobilisation des parents, aux côtés de Marie de Vals à Toulouse, en 1969 . Marie de Vals, après avoir été enseignante à la Source auprès de Françoise Jasson pendant 13 ans, revient dans sa ville natale pour des raisons familiales et continue à faire de l’Éducation nouvelle dans une petite école, qui, victime de son succès, devient vite trop petite. Les parents, associés aux décisions, la soutiennent dans ses projets d’agrandissement, et la suivent dans une école diocésaine comportant un collège dont elle reprend la direction en précisant bien qu’elle y fera de l’Éducation nouvelle, ce qui en déconcerte certains… Une volonté forte est de créer une école pour tous, Marie de Vals tiendra à accueillir les enfants en difficulté, handicapés, porteurs de différence :

« Nous n’avons pas cherché les enfants en difficulté, ils sont venus et nous les avons accueillis »

en les intégrant dans les classes, dont l’effectif ici n’est pas réduit car elle voulait démontrer que l’Éducation nouvelle pouvait se pratiquer dans les mêmes conditions que dans les autres écoles, ainsi elle alignera toujours ses effectifs sur les écoles de quartier. Cela a permis aux enseignants de trouver comment faire travailler les enfants en autonomie, de chercher de nouvelles méthodes, puisqu’ils étaient obligés de se débrouiller, c’est ce que Marie de Vals cherchait à instaurer …

On constate que le succès de ces écoles fut immédiat : elles se créaient avec moins de 20 enfants, parmi lesquels beaucoup d’enfants avaient des difficultés scolaires, et quelques années après, ces écoles recevaient entre 50 et 100 enfants parmi lesquels le nombre d’enfants sans difficultés était largement représenté. Ainsi ces directrices ont su convaincre les parents du bien fondé de l’Éducation nouvelle qu’elles pratiquaient dans leurs écoles, parents qui ont apporté leur soutien logistique (hébergement de l’école au Chapoly), financier par l’ apport de capitaux à Antony, moral et pédagogique par leur participation à la gestion et aux activités pédagogiques, comme ce fut le cas à l’école de la Rize, créée par Marguerite Bernard après son apprentissage à Lyon auprès de Germaine Parot, avant que cette dernière n’implante son école à Écully. Én effet, les parents de la Rize participent très tôt aux ateliers dans les classes, accompagnent les sorties et les classes vertes, sont présents à la cantine .

Dans toutes ces écoles, le rôle des parents sera renforcé après 68, contribuant à créer une équipe éducative rassemblant tous les acteurs de l’école autour d’un projet éducatif globalisant. Ce travail en équipe est indispensable pour animer ce projet d’école, pour faire de la recherche et innover dans les méthodes pédagogiques, puisque telle est la mission de cette nouvelle éducation qui doit évoluer pour continuellement s’adapter aux nouvelles connaissances scientifiques et pédagogiques, ainsi qu’à la société en évolution.

3e partie : les liens, les réseaux

Quels les réseaux sous-tendent les liens entre ces écoles ? La recherche et l’innovation ont été soutenues par les liens qu’elles entretenaient avec des mouvements pédagogiques comme l’ENF, le GFEN , et la recherche plus académique venant de l’IPN puis de INRP, comme en témoignent les recherches menées par Foucambert sur la lecture, ou encore les recherches sur les mathématiques modernes de Nicole Picard. Ces mouvements éditaient des revues, organisaient des congrès et des stages de réflexions ou d’échanges de pratiques pédagogiques, auxquels participaient ces écoles nouvelles. Nous avons retrouvé ainsi des témoignages de Roger Cousinet, André Berge, Louis Raillon, Yvonne Hagnauer, Jean Petit, et bien d’autres. Marie Rist, amie de Louis Raillon, participe à la revue Éducation et développement, elle est dans le comité de rédaction, en compagnie de Mion Valloton, directrice de l’école Decroly de St Mandé, Marie-Aimée Niox-Chateau, Françoise Jasson…. Des numéros de la revue seront consacrés à La Source, à l’École d’Antony, et Louis Raillon ira porter l’expérience de l’École nouvelle d’Antony jusqu’au Québec, où il est professeur invité par la Commission des écoles catholiques de Montréal, qui souhaitera implanter l’Éducation nouvelle dans ses établissements après son passage. Les liens avec d’autres écoles, telle l’école Decroly, l’école de Mme Niox-Château, sont forts, comme en témoignent les lettres retrouvées dans les archives de l’école d’Antony, on retrouve aussi des liens avec l’école publique, lors de rencontres pédagogiques avec des instituteurs Freinet, avec Robert Gloton, cet inspecteur à l’origine du groupe Vitruve du XXe arrondissement à Paris. On retrouve également des liens avec des personnalités telles que Françoise Dolto, Louis Cros, ou encore Gilles Ferry, professeur à Nanterre, qui envoie ses étudiantes visiter les écoles nouvelles. Les réseaux liés au scoutisme également, à Lyon comme à Paris, sont une aide, un appui, comme le montre l’expérience d’Émilie Roustin qui trouve les futurs locaux de son école à Levallois Perret grâce à une amie de son groupe d’éclaireuses Elles participent également aux Rencontres Pédagogiques qui ont lieu entre 1964 et 1968, créées en vue de faciliter les échanges des pratiques quotidiennes, et qui s’adressent aux enseignants du privé et du public, mais aussi à toute personne impliquée dans l’éducation. Le besoin de formation en Éducation nouvelle se fait déjà sentir pour les nouveaux enseignants et cela sera une des raisons de la création de l’ANEN.

L’ANEN est créée en novembre 1969, à l’initiative semble-t-il de Françoise Jasson et d’Émilie Roustin, et souhaite répondre au besoin de formation et au besoin d’entraide formulé par les écoles, notamment celles de Lyon qui se sentent isolées. La première réunion a lieu à Lyon en 1970, dans un grand amphithéâtre, les créatrices des écoles nouvelles sont venues parler. Parmi elles Mlle Parot (école à Lyon, Écully), « une vieille demoiselle qui venait parler de l’école nouvelle, et Émilie Roustin, impressionnante… » Il y avait aussi des représentants de la Source, de l’école du Chambon sur Lignon, Antony, Toulouse… Son originalité consiste dans un travail en commun de toute l’équipe de l’ANEN avec les parents , les directeurs les maîtres et les formateurs psychopédagogiques. Son but est que les écoles mettent en place une action commune pour aider un certain nombre d’écoles dans leur recherche pédagogique et leur proposer ses services tant sur les plans administratifs et juridique que pour la formation des maîtres .

C’est ainsi qu’est mis en place le Centre de formation des enseignants en pédagogie nouvelle. Localisé à Viroflay, il accueillait des stagiaires, rémunérés, qui faisaient aussi des études universitaires. Les stagiaires s’engageaient ensuite à travailler en école nouvelle et obtenaient un poste à Lyon, à Toulouse, ou à Paris. Mais les subventions demandées auprès du ministère de l’Éducation Nationale ne sont pas arrivées, et le centre a du s’arrêter, l’expérience revenant trop cher à l’ANEN. De plus le stage mis en place durant ces deux années (1969-1971) n’a pas été reconnu par l’Éducation nationale. Les tractations ont abouti beaucoup plus tard et lorsque les subventions sont arrivées, l’ANEN les a gérées et a repris ces formations mais d’une autre façon . Aujourd’hui, alors que la formation des enseignants pose problème au delà de l’Éducation nouvelle, l’ANEN a remis le centre de formation au centre de ses priorités.

Certaines écoles se désengagèrent par la suite, d’’autres écoles la rejoignirent, comme l’École aujourd’hui, petite dernière de l’ANEN créée en 1975 à l’initiative d’enseignantes de l’École active bilingue Janine Manuel. Certaines d’entre elles se rendent à l’université de Vincennes, pour assister aux cours de sciences de l’éducation, où elles rencontrent un parent d’élève de l’école d’Antony qui sera par la suite directrice de l’école. Créée dans une époque historique et un contexte différent, on retrouve chez ces femmes un réel engagement, auquel participent leur maris notamment à travers le financement de l’école, les salaires ne sont pas versés durant deux ans, le travail n’est pas compté… Là encore une rencontre avec un pédagogue Caleb Gattegno, sera l’occasion de stages et d’échanges de pratiques avec les autres écoles de l’ANEN.

Conclusion

Pour conclure, je rappellerai que ces écoles n’ont pas cessé d’être des lieux d’application de l’Éducation nouvelle, mais aussi des lieux de recherche et d’innovation. Leur regret est de n’avoir pas réussi à intégrer l’école publique, les tentatives en ce sens étant restées lettre morte, ainsi à l’époque de l’école du Père Castor, Marie Rist faisait une demande pour devenir une école expérimentale intégrée à l’enseignement public, demande renouvelée notamment au moment de la loi Savary. Une des explications de la méconnaissance de ces femmes est la non théorisation de leurs pratiques, certaines ont relaté leur expérience dans des ouvrages , ont participé à des revues, mais pas suffisamment pour être reconnues. Leur volonté était d’être des praticiennes et non des théoriciennes, et en ce sens elles ont atteint leur but, leurs écoles ayant reçu des milliers d’enfants, ainsi que leurs parents, dont le rôle fondamental, qu’il soit financier et moral participe bien évidemment à la longévité des ces écoles.

Je finirai sur une phrase porteuse d’espoir de Marie de Vals, et qui montre bien l’engagement de ces femmes directrices d’écoles nouvelles :

« Ce qui est curieux avec l’Éducation nouvelle et ce qui me paraît très important, c’est que le jour où l’on y goûte, c’est un point de non-retour »